Histoire de la famille SAVARIN

Alors que dans le "Mémorial des Dombes" d'Assier de Vallenches leur attribue une origine vénitienne, il semble plutôt que les premiers Savarin qui vinrent s'installer à Brénod soient arrivés de Florence. Les Savarini auraient été obligés de quitter la Toscane peu après l'avènement dans la cité Florentine, des Médicis auxquels leur famille se serait trouvé opposée, conséquence de la lutte au cours de laquelle s'affrontèrent les Guelfes, partisans des papes, et les Gibelins, partisans des empereurs d'Allemagne.

le village de Brénod (France, département de l’Ain)

Les premières générations fixées à Brénod ne se consacrèrent qu'à l'exploitation des terres qu'ils avaient acquises à leur arrivée dans le pays. Un des premiers membres de la famille Savarin dont on puisse retrouve; la trace dan s les archives d'état civil est Antoine Savarin, né à Brénod vers 1495 et mort le 11 avril 1562. Un document daté du 23 novembre 1489 fait état d'un Guillaume Savarin, syndic de Brénod. Plusieurs membres de la famille ont d'ailleurs rempli cette fonction ; on trouve en effet : Jean, syndic en 1514, André en 1557, Guillaume en 1570, Antoine en 1581. Le 15 mars 1575 un Savarin, Jehan, docteur en médecine, est nommé capitaine de santé à Bourg pour prendre des mesures contre la peste qui faisait des ravages dans cette ville. Un autre, Jacques Savarin, fut recteur de l'hôpital ce Bourg de 1603 à 1607. On remarque en outre en 1575 que c'est un Savarin qui devient curé de Brénod. Dans les archives municipales, on trouve également une lettre de grâce et d'abandon de poursuites datée du 24 octobre 1497, accordée par le duc de Savoie aux habitants de Brénod qui avaient insulté et frappé le procureur du Bugey, le commissaire aux extentes de Châteauneuf et 2 Sergents Généraux des mains desquels ils avaient arraché Antoine Savarin que l'on emmenait prisonnier Les habitants de Brénod eurent néanmoins 100 florins à verser au Trésorier de Savoie. En 1576, Claude Savarin, descendant du précédent, devint notaire ducal.

Alors que les Savarin renforcent leurs attaches à Brénod en occupent certaines fonctions et en acquérant de nouvelles terres, certains d'entre eux s'en éloignent et vont s'installer à Belley, à Nantua et à Bourg, vers le milieu du XVIème siècle. A remplir ces diverses fonctions juridiques et ecclésiastiques les Savarin devinrent peu à peu une famille de robe. Un acte daté du 10 janvier 1605 stipule que Claude Savarin, contrôleur, clerc-juré et greffier de Châtillon-sur-Saône, renonce à sa charge au profit de Jean Fauvart qui avait épousé sa fille Bénigne. En 1649 un Savarin est notaire royal de Brénod. De 168l à 1693 c'est Pierre Savarin qui occupe cette fonction ; il avait épousé Anne de Bovier. Pierre Savarin fut l'un des premiers à occuper une charge relativement importante à cette époque : il fut avocat en parlement, conseiller et procureur du roi Louis XIII en l'élection su Bugey, Valromey et Gex de 1618 à 1626 ; il fut également, pendant cette période, syndic de Belley. Au baillage de Belley, en 1619, c'est Paul Savarin qui est procureur du roi. L'influence de .Pierre Savarin ne fut sans doute pas étrangère a la nomination de son parent à ce poste. Pierre Savarin fut donc le premier de la lignée des procureurs du roi que la famille allait compter dans ses rangs tout au long, du XVIIème siècle. Il fut apparemment le premier à porter les armes, déclarées officiellement en l'exécution de l'Edit Royal de 1696, qui allaient devenir celles de le famille : D'azur à une fasce ondée d'or accompagnée de trois roses de même posées deux en chef une en pointe. Ces armes furent cependant modifiées très légèrement quand plusieurs membres de la famille occupant une position particulière les utilisaient simultanément ; ce fut notamment le cas en 1696 : alors que Martin Savarin portait d’azur à une fasce ondée d'or accompagnée de trois roses d'argent boutonnées d'or, François Savarin, conseiller du roi et son procureur en l'élection de Belley, avait les trois roses d'argent boutonnées de gueules, tandis que sur le blason de Jean François Savarin qui était à la même époque conseiller, notaire, secrétaire près de la cour du Parlement des Dombes, les trois roses étaient d'or. Il ne s'agissait là que de modifications légères qui n'intéressaient que les émaux et non les pièces et meubles du blason.

Jean-François Savarin, le fils de Pierre, occupa les mêmes fonctions que son père de 1649 à 1684 ; il fut également syndic de Belley en 1654. Il épousa la fille d'Antoine Fabri de Virieu-le-Grand, Anthelmette. De cette union, Jean-François Savarin eut deux filles : Claudine et Marie-Gasparde. La première épousa Jean Brillat le 27 octobre 1675 ; la seconde, morte célibataire, avait fait son légataire le fils de sa sœur, avec obligation de donner lui-même à son fils, de par la loi, le nom de Brillat-Savarin. Ce testament était daté du 17 septembre 1735. Marc Anthelme qui devait porter le premier le nom de Savarin accolé à celui de Brillat était né en 1730. Il épousa Claudine Récamier, grand-tante du docteur Récamier, mari de la célèbre Juliette, le 18 septembre 1755 et c'est de cette union que devait naître à Belley, le 3 avril 1755, Anthelme Brillat-Savarin, l'auteur de ''La Physiologie du Goût".

On remarque que les familles Brillat et Brillat-Savarin, occupèrent, comme les Savarin, des fonctions juridiques. Jean Brillat (1645-1703) était avocat au Parlement du Bugey ; Etienne Brillat (1693-1753) était procureur en l'élection du Bugey, Valromey et Gex ; Marc Anthelme Brillat-Savarin (1730-1790) eut les mêmes fonctions ; Anthelme Brillat-Savarin (1755-1826) fut avocat et député de la Bresse aux Etats Généraux du 5 mai 1789. En 179l, après la dissolution de l'Assemblée Constituante, il est nommé Président du Tribunal de l’Ain. Suspecté de royalisme, il est "mis à pied" l’année suivante. Ses concitoyens, "appréciant son esprit conciliateur et ses connaissances juridiques, l'élirent maire de Belley en 1793. A son retour d'exil, il fut nommé commissaire du gouvernement près le Tribunal de Versailles. En 1801 il deviendra conseiller à la Cour de Cassation, poste qu'il occupera jusqu'à sa mort survenue à Paris en 1826.

A noter que les Brillat firent enregistrer par d'Hozier des armes ayant les mêmes pièces et le même fond d'azur que les armes des Savarin, mais les roses étaient toutes les trois disposées sur la fasce de l'écu et non en chef et en pointe.

Jean-François Savarin n'ayant donc eu aucune descendance mâle, c'est son neveu François Savarin qui fut à son tour conseiller et procureur du roi en l'élection de Belley de 1664 à 1693. Un autre Savarin, prénommé également Jean-François, reçut le 13 novembre 1698 ses provisions de conseiller, notaire, secrétaire auprès de la cour du Parlement de la Principauté des Dombes. Le frère de François Savarin, Joseph, était à la même époque avocat au parlement ; il fut syndic de Belley en 1682, syndic général1 des pays du Bugey et député de Belley le 14 septembre 1696 auprès le l'intendant de Bourgogne et de Bresse.

On peut se demander ce qui a incité les membres de cette famille à se succéder aux mêmes charges. Or a cette époque l'aspiration principale du roturier opulent ou du fonctionnaire de quelque importance est d'être anobli. L'anoblissement correspond alors à 1a promotion socia1e la plus enviable ; il s'obtient de différentes manières. Dans certains cas, il est immédiat dès l'entrée en fonction, dans d'autres, il faut avoir occupé 1a charge pendant 20 ou 25 ans ; si l'on meurt en charge, les descendants bénéficient de l'anoblissement ; enfin, dans d'autres cas, il faut qu'une même famille ait exercé pendant deux ou trois générations sans interruption une charge anoblissant. Comme le déclare Bertaut de Fréauville dans son ouvrage les Prérogatives de la Robe : "étant devenu juge des nobles, s'il n'est élevé au-dessus d'eux, il est au moins leur égal". Une noblesse limitée à son premier recrutement médiéval eût gardé pour devise l’insolent Qui t’a fait roi ? En élargissant les rangs de la noblesse par ce moyen, en régularisant son recrutement constant, la monarchie empêchait ainsi l'élément noble de devenir un danger pour l'État. C'est ainsi que Jean François Savarin remplit les conditions d'anoblissement ; il mourut en charge : entré en fonction le 15 novembre 1698, il s'éteignit le 27 décembre 1702. Son poste échut alors à Hugues Pomey de Rochefort en 1703. Son acte de décès stipule qu'il a été inhumé dans l'église paroissiale Saint-Laurent de Belley et le qua1ifie de "noble Jean François Savarin. Son petit-fils Martin, chanoine de l'église cathédrale de Belley, fut le principa1 bénéficiaire de cet anoblissement et représenta sa famille du 20 août 1714 au 1er août 1724 à l'assemblée de la noblesse du Bugey. Son cousin Joseph Savarin fut avocat en parlement à Belley (dont il fut syndic en 1652), député le 14 septembre 1696 par la ville de Belley près de l'intendant de Bourgogne et de Bresse.

De la fin du XVIème siècle jusqu'à la Révolution, le clergé des pays de Bresse compta de nombreux Savarin appartenant aux différentes branches de la famille. Charles Savarin, prêtre vicaire à Châtillon-sur-Chalaronne en 1666 ; André, curé de Corveissiat en 1639 ; Claude, vicaire à Genay en 1624, à Corveissiat en 1648 ; un autre Claude, curé de Brénod en 1648 ; Jean, curé de Brénod en 1678 ; François, vicaire de Sainte-Bénigne en 1669 ; Jean Joseph, archiprêtre, curé de Béon de 1749 à 1774 ; un autre Savarin, prêtre vicaire de Brénod en 1742 ; Louis François, vicaire de la cathédrale de Belley (arrêté sous la convention par ordre de GOULY pour avoir tenu des propos défavorables à Marat le 15 Brumaire an II, il fut incarcéré à Tournus) ; Louis Savarin-Marestan de Brénod, curé de Belmont (17291781) ; Jean Marie Savarin, curé de Jasseron (1643-1648) ; Jean François Savarin-Pion, né à Brénod, curé de Charencin le 13 octobre 1749 ; son neveu François Marie Savarin sera son héritier et lui succèdera comme curé de Charencin.

Après avoir cité les gens de robe et les ecclésiastiques, voyons ceux des Savarin qui firent carrière sous les armes et dont le nombre est plus limité.

Grâce à l'appui des membres influents de sa famille, Joseph Savarin de Marestan entre aux Gardes du Corps du Roi, à la 2ème compagnie commandée par Jacques Henry de Durfort, duc de DURAS, pair et premier maréchal de France en 1683. Il sert à la compagnie de Duras jusqu'en février 1706. En 1683, il fait partie de la garde qui entoure Louis XIV au Camp de Besançon. Le 16 mars 1690, il est au camp de Compiègne où sa compagnie est passée en revue par le roi. Il sert ensuite en Allemagne sous les ordres du Dauphin. Il participe avec les autres troupes de 1a Maison du Roi au siège de Mons. Le 19 septembre 1691, alors que la bataille fait rage sur les bords de la Leuze, le roi fait donner ses gardes du corps et ses gendarmes à cheva1 ; c'est la plus prodigieuse charge de cavalerie consignée dans les archives de la Maison du Roi et au cours de laquelle Joseph Savarin de Marestan est blessé. A la suite de cette bataille, les archives de la Maison du Roi font état de : "un enseigne, deux exempts, un brigadier et vingt-quatre gardes tués, de deux enseignes, deux exempts, deux brigadiers, un sous-brigadier et soixante gardes blessés (dont Joseph Savarin de Marestan) soit presque le quart de l'effectif de la Compagnie de Duras hors de combat. Au soir de cette victoire mémorable, on compte plus de 50 étendards pris à l'ennemi. Le roi Louis XIV, émerveillé par ce fait d'armes, fit frapper une médaille commémorant l'héroïsme de ses soldats par cette devise : Virtus equitum prætorianorum.

En 1692 Joseph Savarin de Marestan est en Flandre avec sa compagnie qui campe à Givrey (Hainaut) et il participe au siège de Namur. Il prend part ensuite à la bataille de Steinkerque où les troupes royales, sous le commandement du Maréchal de Luxembourg, battent une fois encore les troupes du prince d'Orange. Du 26 au 28 juillet 1693 il est engagé avec sa compagnie dans la bataille de Narwinden au cours de laquelle M. d’Espinay de Saint-Luc qui commande les compagnies des gardes du roi est mortellement blessé. Joseph Savarin de Marestan est blessé à la tête. Les quatre compagnies de gardes du corps du roi rejoignent en 1694 l'armée du Maréchal de Luxembourg, puis retournent dans les Flandres en 1697. Ce n'est qu'en 1698 que Joseph Savarin de Marestan regagne ses quartiers au camp de Compiègne (Coudun) où il séjourne sans interruption jusqu'en 1701. De là, il repart avec sa compagnie à l'armée du Rhin. En 1703 il participe le 15 novembre à la prise de Landau où il est de nouveau blessé et a son cheval tué sous lui. Après avoir fidèlement servi le roi pendant plus de vingt ans, honorant ainsi la devise des Gardes du Corps du Roi "Notre Honneur est Fidélité", il quitte sa compagnie le 9 février 1706, remplacé par Jean de Montplaisir.

Joseph Savarin de Marestan, après avoir quitté la maison militaire du roi reprend du service en qualité de commandant d'une compagnie du Fort de l'Ecluse. Cet ouvrage fortifié qui défend le défilé de l'Ecluse entre un chaînon du Jura et un contrefort des Alpes dépendait alors du Pays de Gex, placé sous l'autorité du prince de Condé. Construit en 1292, il avait subi au cours des siècles plusieurs transformations et avait été agrandi en 1720 ; il était occupé par les milices loca1es qui, d'après un édit de Louis XIV rédigé à Versailles le 31 décembre 1714, "avaient l'avantage d'être regardées comme les meilleures et les mieux armées du royaume". Cette fonction pouvait sembler moins brillante que la précédente, surtout si l'on sait qu'un garde du corps du roi avait préséance sur tous les autres officiers des élections, greniers à sel, juges non royaux et tous autres inférieurs aux conseillers du roi. Seuls ces derniers et les sénéchaux avaient rang dans les assemblées provinciales avant les gardes du corps du roi. Ces derniers ont le titre d'écuyer étant, en qualité de commensaux de la Maison du Roi, des droits honorifiques dans les églises où ils reçoivent un morceau de pain béni de distinction. Ils ne devaient le salut qu'au roi, aux princes du sang, au général de la cavalerie et au maréchal de France. Parmi les privilèges et prérogatives d'un garde du corps du roi, on remarque entre autres qu'il lui était accordé, au bout de 15 années de service, le rang de capitaine de cavalerie. Une ordonnance royale prévoyait qu'un garde du roi devait mesurer au moins 5 pieds, 5 pouces (1,78 m), avoir beau visage, être vigoureusement constitué, bon cavalier et habile au maniement des armes. Il était nécessaire en outre d'être catholique, d'être né sujet du roi et d'être gentilhomme. Aucun garde ne pouvait être reçu sans avoir été présenté au roi. Lorsque Sa Majesté l'avait agréé, un brigadier des gardes le conduisait chez le major qui examinait ses services, son âge son lieu d'origine ; ensuite, le capitaine de la compagnie lui faisait prêter serment dans la salle, en présence des autres gardes sous les armes. L'esprit de corps est un phénomène commun à toutes les armes d'élite. S'il est un comportement, il n'en est pas moins un état d'âme. Il ne fallait guère de temps au gentilhomme reçu aux gardes pour être accepté par ses nouveaux compagnons. Leur faconde, leur goût pour le faste et la représentation, le sentiment de leur supériorité dû aux conditions particulières d'admission avaient fait naître chez eux un véritable esprit de caste.

A la suite de Joseph Savarin de Marestan, on trouve encore trois autres Savarin membres de la Maison du Roi, deux dans les gardes du corps et un dans les mousquetaires. Guillaume Savarin de Marestan sert aux gardes du corps pendant 35 ans, de 1698 à 1733. Il participe également à la prise de Landau en 1703. Après avoir été à l'armée des Pays-Bas de 1704 à 1706, il prend part au Combat d’Oudenarde. Dans cet engagement où le maréchal de Vendôme et le duc de Bourgogne sont battus par le prince Eugène, les gardes du corps subissent de lourdes pertes. En 1709 il se rend avec sa compagnie à la Bastie où se forme l'armée du Maréchal de Villars. A la bataille de Malplaquet, Boufflers lance la cavalerie de la Maison du Roi sur le flan des Impériaux pour éviter au centre de l'armée française d'être enfoncé. En dépit de charges désespérées contre la cavalerie allemande sans cesse renouvelée, le marécha1 de Villars est battu par Malborough et le prince Eugène. Il y a près de deux cents morts dans les gardes du roi et autant de blessés. On ln3 on retrouve Guillaume Savarin de Marestan à la campagne d'Alsace, la dernière que firent les membres de la maison militaire du roi Louis XIV mort à Versailles le 1er septembre 1715. Il quitte la maison du roi après 35 aS6ns de service et après avoir reçu le brevet de capitaine de cavalerie et 1a croix de Saint-Louis. Il occupe ensuite les fonctions d'aide-major à Hesdin jusqu'à sa mort après 56 ans de service.

En 1720 André Guillaume Savarin de Marestan, fils du précédent, entre à son tour aux gardes du corps du roi. Le 28 mai 1725, Louis XV fit annoncer son prochain mariage avec Marie LECZINSKA dans toutes les églises de France. Ce mariage eut lieu le 3 septembre à Fontainebleau. Après la messe, célébrée par Armand, Gaston, Maximilien, cardinal de Rohan, deux compagnies des gardes du roi escortèrent les nouveaux mariés de la chapelle jusqu'aux appartements du Savarin de Marestan est à l'armée d'Allemagne et prend part à toutes les opérations qui s'y déroulent ; il sera blessé le 4 mai 1734 en forçant avec sa compagnie les lignes d'Ettlingen. André Guillaume est contraint de quitter les gardes du Corps du Roi en 1758, à la suite d'ure chute de cheval. Il y avait servi pendant 17 ans. Il occupe ensuite les fonctions d'aide-major et de capitaine des portes de la ville de Dieppe. En 1744 il avait épousé Françoise le Bosseur de la Bauve. Il est mort en 1769 après 48 ans de service. Le 20 décembre 1762 il avait accompagné la comtesse d'Allion qui présentait son fils Antoine André Michel Savarin de Marestan aux Mousquetaires du Roi. Ce dernier y sert jusqu'au 15 décentre 1775, date de la dissolution du corps des mousquetaires. Il a donc passé 13 ans à la première compagnie des mousquetaires du Roi et il avait reçu son brevet de capitaine le 28 mai 1775. Cette compagnie avait été commandée précédemment par Charles de BAATZ, seigneur d'Artagnan, qui fut tué à Maastricht en 1673 et qu'Alexandre Dumas allait rendre célèbre par son roman Les Trois Mousquetaires. Son oncle Eustache Charles le Bosseur de la Bauve, ancien lieutenant-colonel au régiment Dauphiné Infanterie chevalier de l'ordre de Saint Louis, lui avait légué le château et le fief d'Epluches ainsi que les seigneuries de Lorin, Latreille et Saint Wast. C’est dans cette dernière que se retire en 1750 Antoine André Michel Savarin de Marestan.

Les Savarin qui avaient embrassé la carrière des armes totalisèrent à eux quatre près de 150 ans de service dont 85 dans la maison militaire du roi.

En parcourant les registres de l'état civil, on remarque que dans de nombreux cas un autre patronyme est accolé à celui de Savarin, cela pour différencier les branches de la famille, fort nombreuses, comme en témoigne la somme énorme des actes. On trouve notamment des Savarin-Barbier, Savarin-Bonhomme, Savarin-Guibert, Savarin-La France, Savarin-Maistrebert, Savarin-Marestan, Savarin-Mochon et Savarin-Pion. Le patronyme accolé à celui de Savarin venait généralement d'une alliance, mais parfois aussi d'un surnom qui finissait par faire partie du nom. Joseph et Antoine André Michel Savarin de Marestan dont il a été question étaient issus de la branche des Savarin-Marestan où l'on trouvait Claude et François, également Humbert Savarin-Marestan qui était notaire roya1 en 1650 et dont la fille Anne épousa en 1669 Claude Rolet, châtelain d'Echallon. C'est son neveu, Alexis Savarin-Marestan (né à Brénod le 15 août 1668 mort le 14 juillet 1745), qui lui succèdera comme châtelain de Meyriat ; il était avocat à la cour ; de son mariage avec Louise Billon naquit le 14 janvier 1706 Claude Guy qui eut pour parrain Guy de Montillet, seigneur du Châtelet et de Champdor, conseiller de Monseigneur le duc du Maine au Parlement des Dombes. Dans cette branche, on trouve également J.M. Savarin-Marestan, né à Brénod vers 1778, chirurgien aux armées de la :République, docteur en médecine à Paris en 1803, mort vers 1811. Joseph Bruno Adolphe Savarin-Marestan, de Poncin, acquit de M. de Meillonnas, le 10 janvier 1863, le château de Neuville-sur-Ain qu'il cèdera plus tard à M. de Saint-Didier.

La Révolution de 1789 allait bouleverser l'existence de certains des Savarin, notamment celle des ecclésiastiques. Jean François Savarin, prêtre, est arrêté et déporté le 15 prairial an II. Louis François, vicaire épiscopal, est déclaré suspect le 15 brumaire an II. Il abdique la prêtrise le 11 frimaire ; arrêté sur ordre de Gouly, il est transféré à Tournus le 14 nivôse an II. On le retrouvera secrétaire de la municipalité de Brénod en l'an VI. Le 15 prairial an II, François Savarin, prêtre, est déporté ses biens sont saisis. François Joseph Savarin, curé de Béon, est arrêté en 1792 ; ses biens sont confisqués. Après sa libération, il revient a Brénod pour cultiver celles des terres qui lui ont été restituées. François Marie Savarin, curé de Charencin, arrêté et déporté en 1792 ; inscrit sur la liste des émigrés le 12 pluviôse an II ; on le retrouvera curé de Petit Abergement en l80l. Jean Claude Savarin, de Jujurieux, notaire et procureur de cette ville depuis 1785 devint député à l'Assemblée de 1789, membre du conseil du district de Saint-Rambert en 1792 ; procureur de la commune le 30 frimaire an II ; il fut dénoncé comme fanatique le 9 nivôse et incarcéré.

Après le départ de Napoléon pour l'Ile d'Elbe, un Savarin Marie César Stanislas, allait être le principal1 acteur d'une tragique affaire. Né le 7 mai 1773 à Jujurieux, il fut volontaire au 3ème Bataillon de l'Ain en 1791 et participa aux guerres de la République contre l'Europe coalisée en tant que lieutenant au 10ème régiment d'Infanterie Légère. Il se retira en 1802 à Saint-Jean-le-Vieux pour y exploiter une propriété qui lui appartenait. Fervent admirateur de l'Empereur, il se mit, lorsque celui-ci débarqua de l'Ile d’Elbe, à la tête d’une bande de paysans du Bugey, et marcha à sa rencontre.

A l'annonce de l'arrivée du duc d’Angoulême à le tête des royalistes, César Savarin se mit en route avec sa troupe pour rejoindre le général Mouton-Duvernet qui devait défendre Lyon contre les troupes du prince royal. Mouton Duvernet, arrivé à Die sur ordre de Louis XVIII pour arrêter l’empereur, y reçut une missive du général Bertrand, grand maréchal de l’empereur, qui se terminait ainsi : " Sa Majesté désire que vous vous rendiez à Grenoble où elle est arrivée   elle compte sur un des généraux de sa vieille garde" " partagé entre la voix du cœur et celle de la raison, il rejoint finalement Napoléon. Après le retour du roi Louis XVIII, Marie César Savarin fut recherché en raison de ses activités pendant les Cent Jours. Le 28 juin 1816 à Combrai, le roi exprime sa volonté d’accorder le pardon et l’oubli pour tous les actes compris entre le 23 mars 1815, date de son départ de Lille et le 28 juin 1815, date de son retour. Il suivait peut-être en cela le conseil que lui avait donné son frère Louis XVI dans la lettre qu’il lui écrivit de la tour du Temple, la veille de sa mort : " N’oubliez jamais que mon héritage est teint de sang et que ce sang vous crie clémence et pardon. Votre frère vous en prie. Votre roi vous le commande. " Il faut toutefois tenir compte de l’état d’esprit qui existait en France à cette époque. Le pays dressait le bilan de la Révolution (persécutions contre les catholiques et les royalistes, loi des suspects, emprisonnements, expulsions, spoliations, crimes de la Terreur) et de l’Empire (banqueroute, guerres civiles et guerres pratiquement ininterrompues avec l’étranger). La vie était difficile au point de faire dire à Talleyrand que ceux qui n'avaient pas vécu avant ca Révolution ne connaissaient pas la douceur de vivre. Dans la nuit du 4 au 5 mai 1816 l'avocat Paul Didier, à la tête de 600 paysans, tente de s'emparer de Grenoble ; l'affaire échoue. Pris, il est condamné à mort et exécuté le 10 juin 1816. Le maire de Saint-Jean-le-Vieux, ,M. Gallien de la Chaux accusa César Savarin d’avoir fait partie de ce complot. Cet édile était un royaliste forcené et l'hostilité qu'il nourrissait contre César Savarin était due aux idées bonapartistes affichées par celui-ci. César Savarin partit se cacher chez des paysans de ses amis à Jujurieux ; il se réfugia, en dernier lieu, chez Antoine Brun à Poncieux, commune de Saint-Jérôme, où il fut arrêté, toujours à la suite de la dénonciation de Gallien de la Chaux. Au moment où il s'enfuyait, en sautant par la fenêtre de la maison où il se cachait, il se cassa la jambe. Après son arrestation, il fut accusé d'avoir tramé un complot contre le gouvernement légitime, d'avoir poussé le peuple à s'armer contre l'autorité royale, d'avoir levé ou fait lever des troupes armées et d'avoir engagé ou enrôlé des soldats sans ordre ni autorisation des pouvoirs légitimes. A cette époque où 1a Terreur Blanche sévissait, tous ceux qui avaient eu une part quelconque de responsabilité dans les Cent Jours se voyaient jetés en pâture à l'opinion publique. Bien que couvert, en principe, par l'amnistie royale, César Savarin fut rendu responsable des pillages commis par sa troupe, alors qu'elle allait à la rencontre du duc d'Angoulême. Une plainte avait même été déposée par le curé d'Ambérieu qui avait été molesté au cours du pillage de sa maison. La réception, par l'Empereur, de César Savarin ne plaidait évidemment pas en sa faveur. On affirma qu'il était en relation avec les Bonapartistes du Bugey, eux-mêmes en liaison avec l'empereur exilé. Un fait est certain : César Savarin avait annoncé publiquement le retour de Napoléon et son arrivée en mars. L'instruction du procès dura trois mois et c’est le 2 septembre 1816 que César Savarin comparut devant ses juges. Ancien officier, il avait demandé à être jugé par un tribunal militaire ou une cour martiale ; sa requête fut rejetée. Après des débats passionnés, son procès se termina le 4 septembre 1816. César Savarin, convaincu d'avoir été l'instigateur d'un complot bonapartiste était condamné à mort. Le 26 septembre 1816, la Cour de Cassation confirma le jugement et un mois plus tard, le 23 octobre 1816 entre 8 et 9 heures du matin, le parquet de Bourg fut informé que la demande en grâce avait été rejetée par Louis XVIII. Le 25 octobre 1816, à une heure trois quart, César Savarin est extrait de sa cellule de la maison d'arrêt de Bourg et conduit par la force armée à la place de la foire où l'échafaud avait été dressé. D'après le compte-rendu de l’exécution établi par le greffier de la Cour d'Assises de l'Ain, Louis Marie Debost " il a été remarqué un public fort nombreux tout au long du parcours menant à la guillotine contenu par une file de gendarmes à cheval en grande tenue. Le condamné, vêtu d'un pantalon noir retenu à la taille par une cravate et d'une chemise blanche dont le col était coupé n'a éprouvé aucune altération du visage et a conservé le plus grand sang-froid à la vue de l’instrument du supplice… S'avançant sur le bord, Clément, chef de la gendarmerie, fit faire silence. Savarin s'adressa à la foule et déclara "que comme homme il avait été sujet à l'erreur, que son cœur ne lui reprochait aucun crime, qu'il avait servi sa patrie avec honneur, qu'il etait victime d'ure faction qui avait juré sa perte, que quelques témoins dans la procédure avaient fait de fausses déclarations, qu'il protestait de son innocence.'' " Et le fer a tranché la vie de ce Savarin:, mort avec une fermeté rare qui caractérise un homme fortement organisé qui regarde le terme de sa vie comme une dette d’honneur à acquitter. Le souvenir de cette affaire se perpétua dans la région pendant plusieurs années. Certains enfants, en allant au collège de Bourg, tracèrent pendant longtemps une guillotine à la craie, sur les volets de la maison de M. Gallien de la Chaux, dénonciateur de César Savarin. Cette maison etait sise à l'angle de la rue du Cône et de la rue Vérihère.

De La Restauration à l'entre-deux guerres, on relève dans L’histoire des Pays de l'Ain d'Eugène Dubois : Joseph Clément Savarin, adjoint au maire de Brénod puis maire le 28 janvier 1860. Jean François Alexandre Savarin, né à Brénod le 18 décembre 1845, prêtre le 26 septembre 1869, vicaire à Corbonod puis à Collonges en avril 1873, curé de Napt le 1er juillet 1874, de Mornay le 7 décembre 1889, mort à Brénod le 29 mars 1916. Félix Savarin, gradué en droit, notaire à Brénod en remplacement de son père le 19 novembre 1877, conseiller le 11 décembre 1881, :maire de Brénod le 9 février 1882. Jules Savarin, directeur de la caisse régionale du Crédit Agricole, médaille militaire 1914-1918, maire de Maillat, candidat aux élections législatives de l945, officier d'Académie en 1947. Marcel Savarin, de Bourg capitaine, mort à Langson le 18 septembre 1944. Pierre François Savarin, né à Brénod le 4 septembre 1815 en la propriété familiale des Granges Gruan vint servir dans la garde municipale de Paris ou il se fixa. Son fils, François Savarin, né à Paris le 15 avril 1847 est l'ancêtre de la branche parisienne des Savarin. Il y a encore aujourd'hui à Lyon et dans plusieurs villes ou villages de l’Ain une vingtaine de Savarin qui, tous, se rattachent à la grande famille des XVIème, XVIIème et XVIIIème siècles.

Rivesaltes, le 12 janvier 1973, Georges Savarin.